(1762-1840)
Auxiliaire de l’évêque de Québec pour le district du Haut-Canada, 1819-1826 
Premier évêque de Kingston, 1826


NOTICE: Jean LeBlanc, Dictionnaire biographique des évêques catholiques du Canada : les diocèses catholiques canadiens des Églises latine et orientales et leurs évêques : repères chronologiques et biographiques 1658-2012, Montréal, Wilson & Lafleur, 2e éd., 2012, pp. 776-778.
Avec l’aimable autorisation de la Maison d’édition, 17 mai 2019.


Né le 17 juillet 1762 dans les Highlands d’Écosse (à Inchlaggan dans le comté de Glengarry selon les uns, à Glen Urquhart dans le comté d’Inverness selon les autres), d’un père catholique et d’une mère protestante, il fit ses études primaires localement, fréquenta le petit séminaire de Glenlivat, et continua ses études au Scots College de Paris pour les terminer, à partir de 1778, à celui de Valladolid en Espagne, où il fut ordonné prêtre le 16 février 1787. De retour en Écosse, il fut missionnaire dans les comtés d’Inverness et de Perth, se rendit en juin 1792 à Glasgow avec ses paroissiens expulsés de leurs terres pour leur trouver du travail, et devint en août 1794 le premier aumônier d’un régiment catholique (Glengarry Fencibles) depuis la Réforme, en garnison dans les îles de Jersey et Guernesey en 1795, et en Irlande en 1798 pour réprimer la rébellion du comté de Wexford. Il conserva cette fonction jusqu’en 1802, date à laquelle le régiment fut licencié. Il se chargea alors de négocier avec le gouvernement britannique, en récompense de leur service militaire, l’émigration de ses ouailles au Canada, arrivant à York (Toronto) le 1er novembre 1804, et se fixant dans le comté de Glengarry où existait déjà une colonie écossaise. Nommé curé de St. Raphael en 1805, où il commença la construction d’une église imposante, il devint en février 1806 vicaire général de Québec pour le Haut-Canada.

Élu le 12 janvier 1819 évêque titulaire de Rhesaina et auxiliaire de Québec pour le Haut-Canada (selon un décret de la Propagande du 23 novembre 1818 approuvé par le pape le 6 décembre), il fut sacré le 31 décembre 1820 dans la chapelle des Ursulines de Québec par Mgr Plessis, archevêque de Québec, assisté de deux prêtres, Jérôme Demers, supérieur du séminaire, et Joseph Signay, curé de Québec. Le roi Georges IV lui avait offert, dit-on, son anneau épiscopal. Il conserva ses fonctions de curé de St. Raphael et de vicaire général. Devenu évêque de Kingston le 27 janvier 1826 (selon un décret de la Propagande du 20 décembre 1825 approuvé le 8 janvier 1826 par le pape) lors de la création de ce premier diocèse dans les possessions britanniques depuis la Réforme, il demeura à St. Raphael jusqu’en septembre 1831, s’établit ensuite à York (Toronto) jusqu’en mai 1834 à cause de ses fonctions de conseiller législatif, et se fixa alors à Kingston (où il n’avait pris possession de sa cathédrale que le 26 avril 1829). Il mourut subitement, des suites d’une pneumonie, à Dumfries en Écosse, où il s’était rendu pour recruter des prêtres, encourager l’émigration et se procurer des ressources financières pour le Regiopolis College, le 14 janvier 1840. Sa dépouille mortelle, d’abord inhumée dans la chapelle du couvent St. Margaret d’Édimbourg, après les funérailles célé­brées le 25, fut transférée le 26 septembre 1861 dans la crypte de la cathédrale de Kingston.

Conservateur aussi bien en théologie qu’en politique, vertueux, instruit, énergique (il parcourait quelque 2,000 milles par année), d’une endurance physique remarquable (il mesurait 6 pieds), ne ménageant pas ses deniers (il dépensa quelque 13,000 livres de ses propres fonds pour les besoins du diocèse), parlant bien le français et l’espagnol, il consacra sa vie au bien-être spirituel et temporel de ses compatriotes (il se rendit cinq fois en Europe pour défendre leurs intérêts), malgré des difficultés avec un clergé parfois indiscipliné (surtout parmi les prêtres d’origine irlandaise) et même alcoolique. Alors qu’il avait pris la tête d’un diocèse s’étendant du Lac Supérieur à la frontière québécoise et comptant trois prêtres et trois églises, il le laissa à sa mort avec 30 prêtres et 38 églises. Tout en maintenant de bonnes relations avec les évêques du Bas-Canada (correspondant en particulier avec NN.SS. Lartigue et Bourget) et les Sulpiciens, il favorisa le démembrement du diocèse de Québec, se rendant à Londres et à Rome à quelques reprises à cette fin. Il favorisait la création d’un diocèse regroupant le Nouveau-Brunswick, l’Île-du-Prince-Édouard et le Cap-Breton, avec siège à Charlottetown, et voyait dans la création d’un autre diocèse dans le Haut-Canada un facteur de cohésion culturelle et religieuse qui mettrait ses habitants à l’abri de la contagion américaine, démocratique, égalitariste et républicaine, et une garantie de stabilité pour le maintien de la province dans le giron britannique. Tolérant en matière religieuse (on rapporte même qu’il fermait les yeux sur la distribution par la British and Foreign Bible Society de versions française et gaélique des Écritures à ses ouailles, et il exemptait des exercices religieux les élèves protestants fréquentant l’école catholique), il estimait la population du Bas-Canada, et blâma les excès des répressions qui s’y firent jour lors des troubles de 1838. Il tenait de ses origines jacobites un fort sentiment d’attachement à la monarchie (il trouvait les évêques du Bas-Canada trop démocrates !), et de sa formation un conservatisme prononcé, même s’il était conscient des inconvénients du Family Compact et combattit le système des Clergy Reserves.

Il rendit de grands services au gouvernement lors de la guerre de 1812 en collaborant à la levée d’un régiment et en servant d’aumônier, et également lors de l’insurrection de 1838, qu’il condamna fermement par mandement, parce qu’il croyait que les abus du système devaient être corrigés par des moyens constitu­tionnels. Il soutint publiquement le gouvernement lors des élections de 1812, 1828 et 1836, et ce dernier lui témoigna sa reconnaissance en le nommant à diverses commissions (routes, achat de terres indiennes, frontières avec le Bas-Canada), en lui donnant des subventions et des terrains pour les églises et les écoles (ce qui était une façon de perpétuer la loyauté des catholiques), et en le nommant membre du Conseil législatif où il entra le 21 novembre 1831. Il fonda en 1821 le College of Iona dans son presbytère de St. Raphael pour préparer des jeunes gens à la prêtrise, remplacé en juin 1838 par le collège Regiopolis de Kingston. Il jeta aussi les premières bases, sans doute modestes, du réseau d’écoles séparées qui sera reconnu par le Common Schools Act de 1841 ; l’école catholique était pour lui tant un milieu de catéchèse que de promotion sociale pour filles et garçons, et il n’hésitait pas à compléter les subventions gouvernementales de ses propres deniers pour payer les professeurs (il y en avait huit en 1836). Il était l’oncle de l’abbé Angus Macdonell.

Devise : aucune
Armoiries : ARC 220
Iconographie : ARC 220

Bibliographie : on se reportera à la bibliographie compilée par J.E. Rea, DBC/7, 596, à com­pléter par :

  • Macdonell, W.J. Reminiscences of the late Hon. and Right Rev. Alexander Macdonell… Toronto, 1888.
  • Macdonell, J.A. Bishop Macdonell ; a sketch of the life of the Honorable and Right Reverend Alexander Macdonell. Alexandria, 1890.
  • O’Gorman, J.J. Canada’s greatest chaplain. Toronto, 1916.
  • MacDonald, D.R. « The Honourable and Right Reverend Alexander Macdonell, D.D., first bishop of Upper Canada », CCH (1938-39) 9-19.
  • Stewart, W.J. Bishop Alexander MacDonnell and education in Upper Canada. Thèse de maîtrise, Université d’Ottawa, 1942.
  • Macbeth, M. « The Honourable and Right Reverend Alexander Macdonnel, first Roman Catholic bishop of Upper Canada », The Wiseman Review (1963) 179-185.
  • Rivet, L.R. Bishop Alexander Macdonell and his clergy, 1819-1840. Thèse de licence, Université de Montréal, 1970.
  • Rea, J.E. Alexander Macdonell and the politics of Upper Canada. Thèse de doctorat, Queen’s University, 1972. Reprise en monographie, Toronto, 1974.
  • Stanley, G.F.G., « The big bishop, Alexander Macdonell of Kingston », Historic Kingston (1972) 90-105.
  • Sunter, R. « The Scottish background to the immigration of Bishop Alexander Macdonnell and the Glengarry Highlanders », CCH (1973) 11-20.
  • Keleher, J.W. « Bishop Alexander Macdonell », Historic Guelph (1980) 4-23.
  • Reid, S. « The Right Reverend Alexander Macdonnell and the education of the Catholic settlers of Upper Canada », Historic Kingston (1983) 19-31.
  • Toomey, K.A. Alexander MacDonald : the Scottish years, 1762-1804. Toronto, 1985.
  • Lambert, J. « The face of Upper Canadian catholicism : culture and metro­politanism in the establishment of the Roman Catholic Church in Upper Canada, 1800-1825 », CCH (1987) 5-23.
  • MacDonald, D. Rt. Reverend Alexander Macdonell and related genealogies. Brockville, Ont., 1990.
  • MacDonald, D. Some of the ancestors and relatives of the Hon. & Rt. Rev. Alexander Macdonell, first Catholic bishop of Upper Canada. Brockville, Ont., 1998.