Mgr BAILLARGEON (1798-1870)
Coadjuteur, 1850
administrateur, 1855-1867
15e évêque et 5e archevêque, 1867-1870
NOTICE: Jean LeBlanc, Dictionnaire biographique des évêques catholiques du Canada : les diocèses catholiques canadiens des Églises latine et orientales et leurs évêques : repères chronologiques et biographiques 1658-2012, Montréal, Wilson & Lafleur, 2e éd., 2012, pp. 225-227.
Avec l’aimable autorisation de la Maison d’édition, 17 mai 2019.
Né le 26 avril 1798 à l’Île-aux-Grues, comté de Montmagny, dans une vieille famille du Bas-Canada originaire de l’Angoumois, il participa encore jeune aux travaux de la ferme, et on a écrit que « son enfance s’écoula à la garde des troupeaux ». Il entreprit en 1814 ses études classiques au séminaire de Nicolet et reçut la tonsure en 1818. Il poursuivit alors ses études théologiques à Québec tout en assumant un poste de professeur au collège de la paroisse Saint-Roch, et fut ordonné prêtre dans la cathédrale de Québec par Mgr Plessis le 1er juin 1822, pour entreprendre son ministère comme chapelain de Saint-Roch (1822-1826) et curé de diverses paroisses (St-François de l’Île d’Orléans en 1826-1827, Ange-Gardien de Montmorency et Château-Richer de 1827 à 1831, Notre-Dame (cathédrale) de Québec de 1831 à 1850, ce dernier poste malgré ses protestations. Il fut nommé le 16 mai 1850 agent, vicaire général et procureur des évêques de la province ecclésiastique de Québec à Rome.
Élu le 14 janvier 1851 évêque titulaire de Tlos et nommé le lendemain coadjuteur c.f.s. de Québec selon un décret de la Propagande daté du 3 janvier, il fut sacré à Rome, église des Lazaristes in Montecitorio, le 23 février 1851 par le cardinal Fransoni, préfet de la Propagande, assisté de Mgr Hughes, archevêque de New York, et Mgr de Mazenod, évêque de Marseille et fondateur des Oblats de Marie-Immaculée. De retour à Québec le 1er juin 1851, il était chargé de remettre le pallium à Mgr Turgeon qui, frappé d’hémiplégie, lui confia l’administration effective du diocèse le 12 avril 1855, et à qui il succéda le 25 août 1867, prenant possession du siège le 28. Pie IX le nomma comte romain et assistant au trône pontifical en 1862 lors d’un voyage qu’il fit à Rome pour la canonisation des Martyrs du Japon, et il reçut le pallium, qui lui avait été concédé le 20 septembre 1867, des mains de Mgr LaRocque, évêque de St-Hyacinthe, le 2 février 1868. Il présida en 1863, évitant les questions controversées, le IIIe et en 1868 le IVe concile provincial de Québec (on lui avait reproché, lorsqu’il n’était qu’administrateur du diocèse, de négliger les besoins de la province ecclésiastique), et participa en 1869 au concile du Vatican. De retour à Québec pour cause de maladie en mai 1870, il y mourut le 13 octobre et fut inhumé dans la cathédrale le 18.
On rapporte qu’il fut le premier évêque canadien nommé en dehors de toute intervention du gouvernement britannique depuis la Conquête. De tempérament effacé et de santé fragile, loin d’être un chef naturel mais clairvoyant et serein, d’un grand tact et d’une profonde délicatesse à l’égard des personnes, il se sentira toujours inférieur à sa tâche, présentant par exemple sa démission en 1864, lors des discussions sur le projet de Confédération, parce qu’il s’estimait inapte à faire face aux crises politiques de l’époque. Ce fut un pasteur prudent et d’une grande sollicitude, qui s’était dépensé sans compter lors des calamités qui frappèrent la ville de Québec dans la première moitié du XIXe s. (choléra de 1832, 1834 et 1849, incendie de 1845, typhus de 1847). Comme l’a montré R. Hardy, son activité comme curé, pendant presque 20 ans, de la paroisse Notre-Dame de Québec, qui desservait quelque 16,000 fidèles (10,000 francophones, 6,000 anglophones), fut remarquable au plan social. Bien que s’inscrivant davantage dans une perspective paternaliste que dans un souci de réforme, elle se manifesta surtout dans le domaine de l’assistance (chômeurs, infirmes, orphelins, filles-mères, délinquantes), avec les hospices des Sœurs de la Charité et St-Joseph, et les asiles du Bon-Pasteur et Ste-Brigitte. Il appuya en 1846 la fondation de la première conférence de St-Vincent-de-Paul par Joseph Painchaud fils, inspirée d’Ozanam (bureau de placement, collecte de vêtements). Toutes ces œuvres caritatives illustrent à l’échelle locale et dans un autre registre le réveil religieux connu par le Québec à cette époque : retraites paroissiales comme celle de septembre 1840 (24 sermons) prêchées par Mgr de Forbin-Janson et celle de 1847 par le futur Mgr de Charbonnel ; campagnes de tempérance ; confréries ; dévotions populaires (Mois de Marie, indulgences pour promouvoir les œuvres de charité, processions). Tout ceci favorisé dans la capitale par les mauvaises récoltes causant misère et famine, par les problèmes du commerce et de l’industrie, et par les calamités comme les maladies contagieuses ou les incendies qui frappèrent la ville.
Il s’intéressa particulièrement durant son épiscopat à la formation du clergé ainsi qu’à l’éducation de la jeunesse, en relation évidemment avec la formation morale et la nécessité d’enseigner la religion à l’école, tant au niveau universitaire qu’à celui des écoles normales, collèges et écoles primaires, qu’il multiplia. Il y avait ainsi dans sa paroisse, en 1838, 19 écoles scolarisant quelque 1,800 élèves dont autant de filles que de garçons, et c’est lui qui y fit venir en 1843 les Frères des Écoles chrétiennes. Il favorisa la création des Zouaves pontificaux ainsi que l’organisation du Denier de Saint-Pierre et la création de bibliothèques paroissiales ; il en avait d’ailleurs fondé une en 1843 lorsqu’il était curé. Il lutta également contre les divertissements et les influences extérieures susceptibles de compromettre son action pastorale (bals, soirées mondaines, spectacles comme le théâtre et l’opéra, intempérance, mauvaises lectures), sans négliger les problèmes du prolétariat ouvrier, comme en témoigne sa circulaire du 15 février 1867, mais aussi sans en tirer toutes les conséquences pratiques quant à l’action des pouvoirs politiques. Indépendant d’esprit, il ne partageait pas nécessairement toutes les tendances ultramontaines militantes de certains de ses collègues dans l’épiscopat, notamment Mgr Bourget, avec lequel il ne s’entendait pas non plus sur les questions de liturgie. Il prêcha la tolérance par nécessité lors de l’adoption du nouveau Code civil entré en vigueur en 1866, et contestait les recours continuels à Rome pour des questions qu’on aurait pu facilement régler sur place. Il favorisa aussi, sans enthousiasme mais sans appréhension, l’avènement de la Confédération de 1867, qu’il considérait comme un moindre mal en regard de la représentation basée sur la population, d’une part, et d’autre part des dangers d’annexion aux États-Unis, comme en témoigne sa lettre pastorale du 12 juin 1867.
Devise : NON QUOD EGO VOLO
Armoiries : ARC 99
Iconographie : ARC 99 ; DER 8
Œuvres : Il est l’auteur d’une traduction du Nouveau Testament : Le Nouveau Testament de Notre Seigneur Jésus-Christ, traduit en français… Québec, 1846. Ce travail avait pour but de combattre le prosélytisme protestant, et en particulier de faire échec à la distribution des bibles protestantes. Il avait consacré 30 minutes à la traduction de chaque verset, ce qui faisait au total 2 ans, 8 mois et 21 jours, à 4 heures de travail par jour.
Mandements :
- Recueil d’ordonnances synodales et épiscopales du diocèse de Québec. Québec, 1859.
- v. 4 des Mandements, lettres pastorales et circulaires des évêques de Québec. Québec, v. 1, 1887-
Bibliographie : on se reportera à la bibliographie compilée par L. Lemieux, DBC/9, 22, à compléter par :
- Drolet, A. « Une bibliothèque française à Québec en 1843 », Cahiers de la Société historique de Québec (1961) 16-25.
- Hardy, R. Aperçu du rôle social et religieux du curé de Notre-Dame de Québec, 1840-1860. Thèse, Université Laval, 1968.
- Hardy, R. « Notes sur certaines manifestations du réveil religieux de 1840 dans la paroisse Notre-Dame de Québec », SCH (1968) 81-98.
- Hardy, R. « L’activité sociale du curé de Notre-Dame de Québec : aperçu de l’influence du clergé au milieu du XIXe siècle », Histoire sociale (1970) 6-32.
AUTRES NOTICES EN LIGNE
- LEMIEUX, Lucien, « BAILLARGEON, Charles-François », DBC, vol. IX.
PORTRAITS DES ÉVÊQUES ET ARCHEVÊQUES
Photographies des portraits des évêques et archevêques du grand salon de l’Archevêché de Québec sur les originaux conservés au Musée de la civilisation (Collection Archevêché de Québec). Huile sur toile sauf :
- Card. VACHON : photographie originale par Kdel (Québec).
- Card. OUELLET : photographie originale par Studio Guy Raymond (Québec)