13. Mgr Joseph Signay
Dachowski Photography ©AAQ

Mgr SIGNAY (1778-1850)
Coadjuteur, 1826
administrateur, 1832
13e évêque et 3e archevêque, 1833
archevêque métropolitain, 1844-1850


NOTICE: Jean LeBlanc, Dictionnaire biographique des évêques catholiques du Canada : les diocèses catholiques canadiens des Églises latine et orientales et leurs évêques : repères chronologiques et biographiques 1658-2012Montréal, Wilson & Lafleur, 2e éd., 2012, pp. 1044-1047.
Avec l’aimable autorisation de la Maison d’édition, 17 mai 2019.


Né le 8 novembre 1778 à Québec, fils d’un navigateur au long cours père de 11 enfants, il fit ses études classiques (1791-1797) au séminaire de Québec, prit la soutane le 24 août 1798, et fit sa théologie dans la même institution, tout en y enseignant comme il était coutumier à l’époque. Ordonné prêtre à Longueuil le 28 mars 1802 par Mgr Denaut, évêque de Québec et aussi curé de cette localité, il fut nommé vicaire à Chambly (1802) puis à Longueuil (1802-1804), et devint succes­sivement curé de St-Constant (1804-1805), Ste-Marie-de-Monnoir (Marieville), avec desserte des missions situées sur les rives de la baie Missisquoi (1805-1814), puis de la cathédrale de Québec (1814-1831), où il rétablit les finances de la paroisse.

Élu le 15 décembre 1826, sur recommandation de Mgr Panet (faite le 17 décembre 1825 dans son mandement d’entrée, mais après avoir été choisi par le gouverneur Dalhousie), évêque titulaire de Fussala et coadjuteur c.f.s. de Québec (selon un décret de la Propagande du 20 novembre approuvé le 2 décembre par Léon XII), il fut sacré dans la cathédrale de Québec le 20 mai 1827 par Mgr Panet, archevêque de Québec, assisté de deux prêtres, Jérôme Demers, supérieur du séminaire, et Michel-Candide Le Saulnier, curé de Montréal, tout en demeurant curé de Québec jusqu’en octobre 1831. Il n’avait accepté l’épiscopat qu’à contrecoeur, et seulement à la suite du refus de deux autres candidats. Administrateur du diocèse le 13 octobre 1832 lors de la maladie de Mgr Panet, il devint le 13e évêque et le 3e archevêque de Québec le 14 février 1833, prenant possession de son siège le 16. Il arrivait à la tête d’un immense diocèse, d’une superficie plus grande que celle de l’Europe même après l’érection du diocèse de Montréal en 1836, et qui renfermait à cette date quelque 200,000 fidèles concentrés en très large partie le long du Saint-Laurent.

Il devint métropolitain (un peu malgré lui) le 12 juillet 1844, avec comme suffragants Montréal, Kingston et Toronto, lorsque le gouvernement britannique mit fin à son opposition dans ce dossier, recevant le 24 novembre le pallium qui lui avait été concédé le 22 juillet, mais ne se pressa pas de convoquer un concile provincial. Pressé de plusieurs côtés de démissionner pour inertie, apthie et incompétence – surtout de la part de Mgr Bourget qui le décria à Rome et réclama même son renvoi – il se résolut à remettre l’administration de son diocèse entre les mains de son coadjuteur, Mgr Turgeon, le 10 novembre 1849. Frappé d’une crise cardiaque le ler octobre 1850, il mourut à Québec le 3 et fut inhumé le 7 dans la cathédrale. C’est l’abbé Elzéar-Alexandre Taschereau, son futur successeur et cardinal, qui prononça l’oraison funèbre.

De stature imposante, distingué, bon administrateur, privilégiant la solennité des cérémonies liturgiques, il ne fut ni une forte personnalité (trop timide) ni un homme supérieur (sans véritable vision et un peu tracassier). Plutôt partisan du statu quo au point de se faire accuser d’immobilisme, possédant un sens aigu du compromis et de la modération comme son prédécesseur Mgr Panet, d’où ses réserves à l’endroit de certaines méthodes musclées de Mgr Lartigue, il était plus préoccupé de maintenir la paix et d’éviter les affrontements avec les autorités coloniales que de revendiquer l’indépendance de l’Église (74 paroisses attendaient encore leur érection civile). Ayant à faire face à de graves événements politiques, il publia le 11 décembre 1837 un mandement mettant ses ouailles en garde contre les fauteurs de troubles, et ce n’est qu’avec une grande mesure qu’il s’opposa à l’Acte d’Union de 1840 (on a parlé de « résignation » même s’il encouragea le clergé à signer la pétition). Dernier évêque de Québec semble-t-il à être pensionné par les autorités coloniales, il refusa cependant un siège au Conseil exécutif, ce qui en aurait fait un ministre d’État. C’est sous son épiscopat (1845) que la corporation diocésaine obtint sa reconnaissance civile. Il affronta avec courage et charité les grandes calamités publiques que furent l’incendie du faubourg St-Roch le 28 mai 1845 et du faubourg St-Jean le 28 juin (3,000 maisons détruites, 18,000 personnes sans toit), et les épidémies de typhus de 1832, 1834 et 1849.

Opposé comme son collègue Lartigue de Montréal aux plans du gouvernement colonial de créer un système scolaire neutre, il se préoccupa du développement de l’éducation catholique dans les milieux populaires, dépensant son propre argent pour la construction d’écoles dans les faubourgs de Québec et pour la construction du séminaire de Nicolet. Il demanda en 1836 aux fabriques de consacrer le quart de leur revenu annuel aux écoles paroissiales (il y aura en 1838 dans le diocèse 178 écoles catholiques, seules 11 paroisses n’en possédant pas). Faisant une analyse critique du projet de loi de 1841, il publia le 20 août une lettre – très mesurée – s’en prenant à trois aspects de la législation : non-confessionnalité du système, pouvoirs du surintendant, usage des biens des Jésuites. Il soutint également le développement du collège de Ste-Anne-de-la-Pocatière, accueillit dans son diocèse les Frères des Écoles chrétiennes (1843) ainsi que les Oblats (1844) pour les missions auprès des Montagnais du Saguenay et de la Côte Nord, et favorisa le retour des Jésuites (1849). Il donna une grande impulsion aux sociétés de tem­pérance, encouragea la prédication des retraites paroissiales faite par Mgr de Forbin-Jeanson, et se préoccupa de la propagande protestante dans les Cantons de l’Est. Il convoqua en 1841 la première retraite ecclésiastique, qui réunit 102 prêtres pendant 8 jours. Si en 1844 il permit de faire gras le samedi et abolit les offices des fêtes dites de dévotion, il se montra sévère devant les désordres causés dans l’église par la boisson, interdisant par exemple durant trois ans la messe de minuit dans la paroisse Ste-Marie-de-Beauce où de tels scandales s’étaient produits. Il donna son appui aux sociétés de colonisation des townships formées pour contrer l’exode vers les villes ou les États-Unis, et construisit un nouvel évêché en 1847 (les évêques résidaient au séminaire depuis 70 ans), encore une fois y allant de ses propres deniers. Il s’opposa à la cession au gouvernement des biens des Sulpiciens et réussit en 1836 à obtenir l’érection du diocèse de Montréal, mais désapprouva en 1837 l’établissement d’une province ecclésiastique, estimant que le projet lui causerait trop de tracas.

Il fonda la Propagation de la foi en décembre 1836 (avec une organisation toute laïque), afin de relever les missions pour la plupart abandonnées suite à l’extinction des Jésuites, prévoyant envoyer des missionnaires dans les Rocheuses et jusqu’à la côte du Pacifique, vers les territoires arrosés par le Saint-Maurice, et sur la côte du Labrador jusqu’à la Baie d’Hudson. Il n’oublia donc pas l’évangélisation des marches de son immense diocèse, et c’est lui qui délégua les abbés Norbert et Magloire Blanchet et Modeste Demers sur la côte ouest, principalement pour l’évangélisation des Indiens, les abbés Thibault et Bourassa en Alberta, et l’abbé Laflèche en Saskatchewan, devant cependant refuser à cause de la pénurie de prêtres d’affecter des missionnaires dans les Cantons de l’Est, en Gaspésie et dans le district de la Madawaska. Mais il hésitait à donner des prêtres aux missions des Maritimes, jugeant que si les Irlandais et les Écossais voulaient leur propre diocèse, ils devraient aussi fournir leur propre clergé. Il déplora le fait que son clergé ne comptait pas suffisamment de prêtres parlant anglais, que trop d’entre eux soient imprégnés de gallicanisme, de mennaisisme et de libéralisme doctrinaire, ce qui était germe de division, et qu’en général ils ne consacraient pas assez de temps à l’étude ; mais, comme le nota lord Durham dans son célèbre Rapport, ils entretenaient des rapports très étroits avec la population canadienne. Il avait ordonné 72 prêtres, dont certains après seulement deux années de théologie, mais imposant aux séminaristes dont le régime était encore celui de la régence (études et professorat) un manuel de théologie plus succinct parce qu’ils avaient peu de temps à consacrer à leurs études. Il sacra deux évêques (NN.SS. Turgeon, et MacDonald, évêque de Charlottetown) et, selon Mgr Têtu, l’archidiocèse comptait à sa mort 900,000 catholiques, 572 prêtres, 100 ecclésiastiques et 1,800 élèves dans les collèges.

Devise et armoiries : celles données par ARC 97 sont celles du diocèse ; son sceau ainsi que ses armoiries personnelles sont conservés aux archives de l’archidiocèse de Québec
Armoiries : ARC 97 (celles du diocèse)
Iconographie : ARC 97
Mandements : Mandements, lettres pastorales et circulaires des évêques de Québec. v. 3, 313- 617. Québec, 1888. Plusieurs de ces textes ont été publiés séparément : Bureau de santé, 1832 ? ; instructions en forme de catéchisme sur le jubilé, action de grâces publiques, jubilé de Grégoire XVI, 1833 ; réponse aux requêtes du clergé, indult de Rome, 1834 ; établissement de la Propagation de la foi, Association de prières pour les prêtres défunts, nomination de procureurs pour la Société ecclésias­tique St-Michel, loi sur l’éducation élémentaire, 1836 ; membres du Conseil de l’Association de la propagation de la foi, malheureux événements du district de Montréal, 1837 ? ; actes d’insurrection, retour de la tranquillité dans la province, état actuel de l’instruction, 1838 ? ; propriété des terrains paroissiaux, 1839 ? ; union des deux Canadas, 1840 ? ; naissance du prince héritier, participation du clergé à l’application de la loi sur l’éducation, fête de saint Irénée, 1841 ; lettre du cardinal Fransoni, retraite ecclésiastique, 1842 ; Propagation de la foi, paroissiens aux assemblées de fabrique, assouplissement du jeûne à Montréal, 1843 ; érection de la province ecclésiastique, retraite ecclésiastique, changement dans la loi du jeûne et de l’abstinence, 3e visite des paroisses, mariages mixtes, indulgences, 1844 ; désastres frappant la ville de Québec, 1845 ; traduction française du Nouveau Testament, retraite ecclésiastique, élection de Pie IX, 1846 ; jubilé de Pie IX, 4e visite des paroisses, rapport sur les missions, famine en Irlande, lettre aux évêques irlandais, 1847 ; outrages au pape, erreurs dans le calendrier diocésain, 1848 ; formules des annonces des fêtes, adresse à la Reine, recette de la Propagation de la foi, encyclique, questions d’un comité de l’Assemblée législative, choléra, rapport sur les missions, 1849.
Œuvres : Recensement de la ville de Québec en 1818. Québec, 1976.

Bibliographie : on se référera à la bibliographie compilée par S. Chassé, DBC/7, 866-867, à com­pléter par :

  • Ordre du convoi pour la sépulture de Sa Grâce Monseigneur Joseph Signay, archevêque de Québec. s.l., 1850.
  • Curtis, B. « Irish schools for Canada : Arthur Buller to the Bishop of Québec, 1838 », Historical studies in education (2000) 49-58.

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PORTRAITS DES ÉVÊQUES ET ARCHEVÊQUES

Photographies des portraits des évêques et archevêques du grand salon de l’Archevêché de Québec sur les originaux conservés au Musée de la civilisation (Collection Archevêché de Québec). Huile sur toile sauf  :

  • Card. VACHON : photographie originale par Kdel (Québec).
  • Card. OUELLET : photographie originale par Studio Guy Raymond (Québec)